L’exploitant des barrages hydroélectriques de Song Loulou et Edéa, seul opérateur de production à qui la redevance d’eau est actuellement facturée par Electricity Development Corporation, ne la conteste pas mais met lie les difficultés à s’acquitter de sa dette à la situation financière du secteur de l’électricité en général
En 2019, Electricity Development Corporation (EDC) n’avait pas honoré le règlement du montant échu de la dette vis-à-vis des bailleurs de fonds du projet d’aménagement hydroélectrique de Lom Pangar, soit 9 milliards de F CFA. La Commission technique de réhabilitation des entreprises du secteur public et parapublic (CTR), qui rapportait ces chiffres, avait lié cette situation au non reversement de la redevance d’eau par Eneo. En 2020, le scénario s’était reproduit, le montant lié aux échéances de remboursement de la dette au cours de cet exercice étant alors de 5,5 milliards de F CFA, selon le rapport 2020 sur la situation des entreprises publiques et des établissements publics, publié par la CTR en janvier 2022.
Le producteur et distributeur de l’électricité Eneo, qui n’arrive pas à s’acquitter régulièrement des factures d’EDC concernant la redevance d’eau, a expliqué à Energies Media qu’il ne conteste pas les montants mais qu’il rencontre des difficultés financières à cause du non paiement des factures de consommation par des institutions publiques.
“Est-ce qu’il y a des droits d’eau qui sont dus ? la réponse est oui. Pourquoi ces droits d’eau ne sont-ils pas payés ? Il y a des déséquilibres financiers structurels dans le secteur […] Sur les 70 milliards de F CFA reçus en décembre [dans le cadre d’une levée de fonds organisée par l’Etat auprès des banques au profit d’Eneo, NDLR], il y a une partie qui a été réservée à EDC pour commencer à apurer notre dette sur les droits d’eau. Nous attendons une autre tranche de l’Etat et nous allons utiliser cet argent pour apurer une autre partie de la dette sur les droits d’eau”, a assuré à Energies Media une source autorisée au sein d’Eneo en fin de semaine dernière.
Au cours de l’exercice 2020, EDC a adressé une facture de 12 milliards de F CFA au titre de cette redevance au producteur et distributeur d’électricité Eneo. Ce dernier a réglé 21,42% du montant, selon les données communiquées par EDC à la Commission technique de réhabilitation des entreprises du secteur public et parapublic (CTR).
Factures impayées des institutions publiques
“Il n’y a pas de discussions entre nous et EDC sur les droits d’eau, il n’y a même pas de débat”, a souligné le responsable d’Eneo, qui pointe des difficultés financières pour régler les factures de EDC à cause des factures d’électricité impayées des institutions publiques.
“Nous sommes reconnaissants au chef de l’Etat et au Premier ministre d’avoir pris la décision, en décembre 2021, d’injecter de l’argent dans le secteur. ça va permettre de rééquilibrer certaines choses […] Notre mission en 2022, c’est d’avoir des solutions pérennes, pour que quand une entité publique consomme de l’électricité, quelle que soit cette entité, que ses factures soient payés; quand de l’argent ou des compensations tarifaires doivent être fournies à Eneo, qu’elles soient énoncées à temps et réglées à temps”, a-t-il souhaité.
Les droits d’eau, dus par les exploitants de barrages hydroélectriques, ont été institués par la loi du 14 décembre 2011 régissant le secteur de l’électricité au Cameroun. Facturés depuis 2016, ils sont perçus sous forme d’une redevance par EDC, gestionnaire des barrages réservoirs et société en charge du patrimoine public de l’électricité – pour lui permettre de rembourser les dettes contractées pour certains projets hydroélectriques comme Lom Pangar, et de dégager des excédents pour son fonctionnement et ses investissements. Le barrage réservoir de Lom Pangar en particulier, mis en eau au second semestre 2016 et réceptionné en juin 2017, en régulant le débit du fleuve Sanaga en période d’étiage, sature les centrales hydroélectriques de Song Loulou (384 MW) et d’Edéa (267 MW) – exploitées par Eneo -, permettant à ces dernières de tourner à pleine puissance.
Le produit des droits d’eau est partagé entre EDC et le Fonds de développement du secteur de l’électricité (FDSE), créé en 2020 pour financer la contrepartie de l’Etat dans les projets d’électricité et mener des études dans le secteur, entre autres.