Ouganda: « prudence » dans le calendrier de mise en oeuvre du projet pétrolier Tilenga (DG Total E&P Uganda)




Le projet, opéré par Total pour l’exploitation des réserves situées sous les eaux du lac Albert, devrait aboutir à une décision finale d’investissement en 2020 et un début de production en 2023 après avoir déjà accumulé plusieurs retards

 

Buliisa, au nord-est du lac Albert, à la frontière de l’Ouganda et de la RDC, est situé au cœur du projet « Tilenga », mené par le groupe français Total et censé produire 190 000 barils par jour. Les gisements ont été découverts en 2006 et 14 ans après l’extraction n’a pas encore débuté.

L’opérateur table actuellement sur une décision finale d’investissement en 2020 et un début de production en 2023. Entre les deux, il faut normalement entre trois et quatre ans, le temps de construire les infrastructures nécessaires. « Il y a un vrai souhait, un vrai engagement des deux parties. Je suis assez optimiste dans la réalisation de ces discussions. Maintenant, sur le calendrier, je crois qu’il faut être prudent », souligne toutefois Pierre Jessua, directeur général de Total E&P Uganda, filiale de Total.

Le groupe français envisage de forer là plus de 400 puits reliés par un réseau de pipelines, dont une partie dans le parc national des Murchison Falls. Les compagnies chinoise Cnooc et britannique Tullow sont impliquées à part égale avec Total dans « Tilenga », dans le projet « Kingfisher » (40 000 barils par jour) – géré par Cnooc, au sud-est du lac – et dans le projet « Kaiso-Tonya » (Tullow opérateur). Un autre projet, l’EACOP (East African Crude Oil Pipeline) auquel sont associés les gouvernements ougandais et tanzanien, prévoit la construction d’un oléoduc de 1 443 km de long (dont 296 km en Ouganda) pour exporter le brut jusqu’au port de Tanga en Tanzanie.

L’Ouganda a mis du temps à acquérir une expertise technique, à se doter de réglementations adaptées et à choisir l’itinéraire de l’oléoduc. Le Kenya avait d’abord été pressenti avant que la Tanzanie ne soit choisie en 2016. Depuis, les divers partenaires peinent à négocier les accords commerciaux préalables à la Décision finale d’investissement (FID). Dernier exemple en date, l’échec en août 2019 de la cession d’une partie des parts de Tullow, qui a besoin d’éponger sa dette, à Total et Cnooc.

L’accord a achoppé sur le refus de Tullow de payer une taxe sur la plus-value à la revente de ses titres et sur la volonté de Total et Cnooc, qui auraient porté leurs parts à 44,1%, de déduire fiscalement les actifs récupérés.

Lassé d’investir sans rien voir venir, et en attendant un nouvel accord, Total a décidé de geler toutes ses activités techniques sur le terrain. « Les projets sont techniquement prêts, mais certaines des discussions commerciales se poursuivent », observe Gloria Sebikari, une responsable de l’Autorité pétrolière d’Ouganda (Petroleum Authority of Uganda). « Mais nous restons plein d’espoir, car c’est un projet qui a été approuvé depuis 30 ans ».

Les compagnies pétrolières masquent difficilement leur frustration, après avoir investi plus de 3 milliards de dollars sur la décennie écoulée. « Effectivement, quand on découvre des réserves, on espère mettre en production 7 à 10 ans après (…) Donc on a quand même accumulé un certain nombre de retards », affirme le DG de Total E&P Uganda.

Sous les eaux et sur les rives du lac Albert, barrière naturelle de 160 km de long séparant l’Ouganda de la République démocratique du Congo (RDC) et où coule le Nil blanc, reposent l’équivalent de 6,5 milliards de barils de brut, dont environ 1,4 milliard récupérables dans l’état actuel des découvertes.

L’Ouganda dispose des 4e réserves de pétrole d’Afrique subsaharienne. Elles devraient durer entre 25 et 30 ans avec un pic de production estimé à 230 000 barils par jour.

L’État ougandais y voit la perspective de gagner au moins 1,5 milliard de dollars par an et de faire passer son PIB par habitant de 630 à plus de 1000 dollars.

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