Ce que Rabat et Alger gagnent en faisant passer le gazoduc Maghreb-Europe au Maroc




Le transit du gaz par le GME est avantageux pour les deux voisins. Alger bénéficie d’une route à bas coût; le Maroc des droits de passage payés en nature et du gaz acheté à prix avantageux

 

Alger affiche depuis fin août son intention de fermer le robinet du gazoduc Maghreb-Europe (GME) à l’expiration, le 31 octobre, du contrat qui permet à l’infrastructure de traverser le Maroc pour rejoindre l’Espagne. L’escalade des tensions entre les deux voisins du Maghreb ne faiblit pas.

Selon les experts, le transit du gaz par le GME est avantageux pour les deux voisins. Alger bénéficie d’une route à bas coûts pour environ la moitié de ses exportations vers l’Espagne et le Portugal. En contrepartie, Rabat reçoit annuellement près d’un milliard de m3 de gaz naturel, ce qui représente 97% de ses besoins, selon Geoff Porter, expert en géopolitique du Maghreb. La moitié sont des droits de passage payés en nature, l’autre en gaz acheté à un prix avantageux, selon les experts.

Le pipeline GME (Gaz Maghreb Europe) inauguré en 1996 et qui relie sur 1 400 km les gisements de l’Algérie, le plus gros exportateur de gaz d’Afrique, à la péninsule ibérique, a convoyé environ 10 milliards de m3 par an (pour une capacité de 13,5 milliards).

L’an dernier, la redevance pour le transit du gaz algérien sur son territoire a rapporté au Maroc environ 50 millions de dollars, affirme sous couvert d’anonymat à l’AFP un expert marocain de l’énergie. D’après cet expert, l’Algérie « risque de perdre des milliards de dollars ». Sans le GME, Alger dispose de deux options qui ont chacune des inconvénients.

Options

Le gazoduc sous-marin Medgaz achemine depuis 2011 du gaz algérien jusqu’à l’Espagne mais il opère déjà au maximum de sa capacité de 8 milliards de m3 par an, soit la moitié des exportations algériennes annuelles vers Espagne et Portugal. Le groupe étatique algérien Sonatrach et son partenaire espagnol Naturgy ont prévu d’accroître la capacité à 10 milliards de m3 par an mais cela ne suffira pas.

L’autre choix serait d’expédier davantage de gaz naturel liquéfié par voie maritime. Néanmoins, « cela n’a pas de sens sur le plan économique », selon M. Porter. « Pour priver le Maroc de sa principale source d’approvisionnement en gaz, l’Algérie va potentiellement perdre une partie de ses recettes d’exportation de gaz », souligne-t-il.

De son côté, explique l’expert interviewé sous anonymat, le Maroc qui utilise le gaz du GME pour alimenter des centrales thermiques fournissant au moins 10% de son électricité pourrait devoir compenser par une hausse de ses importations de charbon.

La situation semble inquiéter l’Espagne sur une possible perturbation de ses approvisionnements. Le ministre des Affaires étrangères espagnol José Manuel Albares est d’ailleurs en déplacement ce jeudi en Algérie, premier fournisseur de gaz de son pays, pour discuter du dossier.

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