Les arguments côté turc sur la légalité de l’accord signé entre la Turquie et la Libye sur la Méditerranée orientale




Le bassin du Levant, dans la Méditerranée, recèle des réserves d’environ 1,7 milliard de barils de pétrole brut et 3,45 billions de mètres cubes de gaz naturel. Bataille de frontières autour des hydrocarbures

 

Le gouvernement turc et le gouvernement libyen d’entente nationale (GNA), reconnu par la communauté internationale, ont signé le 27 novembre un mémorandum d’accord en vue de protéger leur souveraineté, leurs droits diplomatiques et économiques en Méditerranée orientale.

L’accord aura un impact direct dans la région, où les tensions ont été fortes ces dernières années à la suite de la découverte d’énormes réserves d’hydrocarbures d’une valeur de centaines de milliards de dollars, et des actions unilatérales de certains pays de la région.

Le bassin du Levant recèle des réserves d’environ 1,7 milliard de barils de pétrole brut et 3,45 billions de mètres cubes de gaz naturel, selon un rapport publié en 2010 par l’Institut d’études géologiques des États-Unis (USGS).

L’Administration chypriote grecque a déclaré des zones économiques exclusives (ZEE) et a commencé à accorder des licences aux compagnies internationales pour la recherche de ressources énergétiques.

La Turquie se défend, pour sa part, d’avoir toujours soutenu l’idée d’un partage des ressources de la région dans le respect du droit international. Elle a indiqué que les forces navales turques interrompront les activités illégales dans la région conformément aux lois internationales.

La Grèce a une alliance maritime régionale avec l’Administration chypriote grecque, l’Égypte et Israël.

Huseyin Isiksal, professeur agrégé au département des Relations internationales de l’université du Proche-Orient de la République turque de Chypre-Nord (RTCN), affirme que le gouvernement turc a fait un pas important dans la définition de son plateau continental et de ses frontières de ZEE dans la Méditerranée orientale.


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Isiksal soutient que la Turquie possède le plus long littoral continental de la région de la Méditerranée orientale et souligne que la décision de la Turquie a été fondée sur les principes selon lesquels les îles situées du mauvais côté de la ligne médiane entre deux continents ne peuvent créer de zones de juridiction maritime au-delà des eaux territoriales et que la longueur et la direction des côtes devraient être prises en compte dans la définition des zones de juridiction maritime.

D’après l’universitaire, l’accord maritime entre Ankara et Tripoli a déjà été envoyé à l’ONU avec ses coordonnées et devrait devenir un accord officiel aux yeux de la communauté internationale selon les procédures.

« Ainsi, une partie importante des frontières des ZEE de la Turquie et de la Libye sera déterminée « , indique-t-il, ajoutant qu’il s’agit du deuxième accord de juridiction maritime de la Turquie dans la région puisqu’elle avait signé un autre accord avec la RTNC en 2011.

Délimitation maritime

Selon Isiksal, bien qu’elle n’ait pas d’accord avec l’Égypte concernant les frontières maritimes, la Turquie a également fait un pas vers la définition de sa délimitation maritime avec l’Égypte sur la base des principes de la ligne médiane.

« Je considère ce mémorandum [Libye-Turquie] comme un accord important contre les tentatives visant à confiner la Turquie dans une zone spécifique de la Méditerranée « .

Il affirme que l’accord conclu par le gouvernement turc avec le GNA en Libye constitue un bouclier entre la Grèce, l’Administration chypriote grecque et l’Égypte, et empêchera Athènes de conclure des accords de juridiction maritime avec l’Administration chypriote grecque et l’Égypte.

« La Turquie est le seul pays à tendre la main au gouvernement libyen reconnu par l’ONU, tandis que la Russie, l’Égypte, les Émirats Arabes Unis (EAU), la France et les États-Unis prennent parti pour le général à la retraite Khalifa Haftar », commente-t-il.

« L’un des plus grands défis de la Libye est la politique du ‘deux poids deux mesures’ que nous observons fréquemment dans les relations internationales », ajoute le chercheur, déclarant que son argument repose sur l’intention de ces pays de soutenir les milices contre le gouvernement libyen reconnu par l’ONU.


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Depuis l’éviction de Mouammar Kadhafi en 2011, deux sièges du pouvoir sont apparus en Libye : l’un de l’Est de la Libye, soutenu principalement par l’Égypte et les Émirats Arabes Unis, l’autre à Tripoli, reconnu par l’ONU et la communauté internationale.

« Ce qui est plus intéressant, c’est que la légitimité de Fayez al-Sarraj [président du conseil présidentiel de Libye] est remise en question par le président [égyptien] Abdel Fattah al-Sissi qui a renversé le président égyptien démocratiquement élu Mohamed Morsi » .

L’académicien souligne que l’action maritime de la Turquie ne devait pas se limiter à la question du droit international et qu’elle devait s’appuyer sur une action politique et diplomatique.

« Le prochain objectif de la Turquie devrait être de négocier avec les parties concernées. Le ministre turc des Affaires étrangères, Mevlut Cavusoglu, a déjà annoncé que la Turquie est prête à conclure des accords bilatéraux ou multilatéraux avec les pays de la région concernant la Méditerranée orientale, à l’exception des Chypriotes grecs. »

« Si l’Égypte et Israël s’entendent avec la Turquie dans la région, ce sera un scénario gagnant-gagnant pour les trois pays », d’après Huseyin Isiksal.

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