Ouganda/Projet pétrolier Kingfisher : l’ONG CRI dénonce des expropriations, violences sexuelles, actes de pollution




Dans son rapport, Climate Rights International (CRI) détaille un « catalogue de violations » qui a accompagné l’installation de Kingfisher, l’un des deux sites de production ougandais, opéré par la compagnie chinoise CNOOC sur la rive sud-est du lac Albert. Le second, baptisé Tilenga, est géré par la multinationale française TotalEnergies sur la rive nord.

 

Violences sexuelles, expropriations brutales, pollution : l’ONG Climate Rights International (CRI) dénonce dans un rapport – publié le 2 septembre – de nombreuses atteintes aux populations et à l’environnement sur un site du mégaprojet pétrolier développé en Ouganda et Tanzanie par les compagnies française TotalEnergies et chinoise CNOOC.

Ce programme, d’un investissement global de 10 milliards de dollars (neuf milliards d’euros), prévoit le forage de plus de 400 puits pour extraire le pétrole de la région du lac Albert, dans l’ouest de l’Ouganda, et la construction du plus long oléoduc chauffé au monde (1 443 km) pour l’acheminer jusqu’au port tanzanien de Tanga.

Il est vivement dénoncé par des associations de défense de l’environnement, qui estiment qu’il menace le fragile écosystème de la région et les populations qui y vivent.

Dans son rapport, Climate Rights International détaille un « catalogue de violations » qui a accompagné l’installation de Kingfisher, l’un des deux sites de production ougandais, opéré par CNOOC sur la rive sud-est du lac. Le second, baptisé Tilenga, est géré par TotalEnergies sur la rive nord.

Des entretiens menés avec 88 personnes ont révélé que la population locale a été expulsée « de force, souvent avec pas ou peu de préavis », par l’armée ougandaise, qui a détruit des bateaux de pêche, principal moyen de subsistance dans la région, souligne l’ONG. Des habitants ont raconté avoir accepté sous la « pression » ou la « menace » des compensations financières qu’ils jugent « bien trop faibles ».

CRI dit également avoir été informé de violences sexuelles commises par des soldats, qui exigent des femmes des relations sexuelles sous peine d’arrestation ou de confiscation des poissons qu’elles vendent pour vivre, mais aussi « par des cadres et des supérieurs dans des compagnies opérant au sein du projet Kingfisher, dont un (cas) impliquant un employé de CNOOC ».

Certaines personnes chargées de favoriser l’embauche des locaux « demandent des pots-de-vin », explique une femme : « Si vous n’avez pas d’argent, il est courant qu’ils demandent des faveurs sexuelles pour obtenir un emploi. » « Au travail, si vous refusez de coucher avec votre patron, vous pouvez être chassée très rapidement », explique une autre.

Deux employés d’une société chinoise chargée du forage ont rapporté des actes de pollution délibérés. « Ils ont expliqué que leur ancien superviseur (…) leur avait demandé de vider les bassins d’eau contaminée de la plateforme de forage directement dans le lac ou sur un terrain vague autour de la plateforme (…) Ces bassins contiennent un mélange d’eau, de pétrole et de produits chimiques », selon le rapport.

Les autorités ougandaises, pour qui ce projet est une manne financière, répriment toute critique et la région vit dans « une atmosphère de peur et d’intimidation », écrit l’ONG. En juin, un militant environnemental, Stephen Kwikiriza, a disparu durant cinq jours. Son association a affirmé à l’AFP qu’il avait été arrêté et battu par des militaires.

Le 9 août, 47 étudiants ont été arrêtés alors qu’ils allaient déposer une pétition au Parlement, quelques jours après l’arrestation de quatre militants devant l’ambassade de Chine.

Des procédures judiciaires contre ce mégaprojet sont en cours en France. Une action civile a été lancée par 26 Ougandais et cinq associations françaises et ougandaises pour demander « réparation » de divers préjudices (expropriations abusives, compensations insuffisantes, harcèlement…) et une plainte au pénal a été déposée par des associations (Darwin Climax Coalitions, Sea Shepherd France, Wild Legal, Stop EACOP-Stop Total en Ouganda) pour « climaticide ».

En janvier, TotalEnergies a annoncé lancer une « mission d’évaluation » de son programme de relocalisations et compensations en Ouganda et Tanzanie.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *