Maroc/Carburants: le PM exposé à la polémique sur les conflits d’intérêts entre milieux d’affaires et monde politique




Pour la première fois depuis la guerre en Ukraine, Aziz Akhannouch a dû s’expliquer devant le Parlement, sur la hausse brutale des prix des denrées alimentaires et des carburants. Si son poste n’est pas menacé, le Premier ministre est sur la sellette en raison de sa double casquette de dirigeant politique et d’actionnaire principal d’Afriquia, leader sur le marché local des hydrocarbures avec Total et Shell

 

La flambée des prix des carburants au Maroc a ravivé une polémique sur les conflits d’intérêts entre milieux des affaires et monde politique, exposant le Premier ministre Aziz Akhannouch (photo), magnat du pétrole, à de vives critiques.

Pour la première fois depuis la guerre en Ukraine, M. Akhannouch a dû s’expliquer, le 18 avril dernier devant le Parlement, sur la hausse brutale des prix des denrées alimentaires et des carburants (14 dirhams le litre de gazole à la pompe, soit 1,32 EUR, un prix haut face à un salaire minimum mensuel à peine supérieur à 260 euros).

Au cœur du débat parlementaire: une demande de plafonnement des marges « exorbitantes » des distributeurs de carburants.

Sur la défensive, M. Akhannouch, un businessman ayant bâti sa fortune sur la distribution des hydrocarbures, a qualifié de « mensonges » les profits « énormes » dénoncés par des députés, assurant qu’ils sont « quasiment les mêmes depuis 1997 ».

Si son poste n’est pas menacé, le Premier ministre est sur la sellette en raison de sa double casquette de dirigeant politique et d’actionnaire principal d’Afriquia, leader sur le marché local des hydrocarbures avec Total et Shell.

Sous pression, son gouvernement a débloqué une enveloppe de 200 millions d’euros en faveur des transporteurs routiers afin d’apaiser leur colère.

Les prix à la consommation (+3,3% pour janvier et février 2022 sur un an) vont continuer de grimper à « des niveaux supérieurs à la moyenne de la dernière décennie », a averti le Haut Commissariat au plan (HCP).

Résultat: le moral des ménages marocains enregistre depuis le début de l’année « son niveau le plus bas depuis 2008 », selon le HCP.

Fin des subventions

Pour approvisionner son marché intérieur, le Maroc dépend essentiellement de l’importation des produits pétroliers. Jusqu’en 2015 l’Etat subventionnait l’essence et le gazole à la pompe. Mais cette subvention a été enterrée en 2015 en raison de son coût élevé pour les caisses de l’Etat.

Depuis la libéralisation, les profits des distributeurs ont atteint « plus de 45 milliards de dirhams (4,25 mds EUR) jusqu’en 2021 », s’indigne Hussein El Yamani, délégué de la Confédération démocratique du travail (CDT).

« Qu’importent l’origine de la flambée du cours du baril, une guerre, une pénurie, une pandémie, les distributeurs prélèvent leur bénéfice comme si de rien n’était », dénonçait récemment l’hebdomadaire TelQuel.

L’exécutif est également critiqué pour son « incapacité » à redémarrer la seule raffinerie du royaume, implantée à Mohammedia, en liquidation depuis 2018.

Pour le syndicaliste El Yamani, il faut soit la nationaliser, soit faciliter son rachat. Sa remise en marche « fera baisser les prix de plus d’un dirham le litre », plaide-t-il, étant donné que « le pétrole brut importé est moins cher (que le raffiné) et que ses capacités de stockage sont supérieures à celles des sociétés pétrolières ».

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