Par l’Institut royal des études stratégiques du Maroc (IRES)
La situation énergétique en Afrique se caractérise par une triple fracture :
- Entre l’Afrique et le reste du monde : A l’exception de l’Afrique du Sud, l’Afrique subsaharienne consomme 16 fois moins que la moyenne. De plus, 46% des personnes n’ayant pas accès à l’électricité dans le monde vivent en Afrique.
- Entre la région nord et sud, d’une part et les autres régions d’Afrique, d’autre part, l’Afrique du Nord et l’Afrique Australe qui représentent 30% de la population africaine consomment 80% de l’énergie à l’échelle du continent. Les inégalités d’accès à l’énergie persistent à l’échelle régionale : Le taux d’accès à l’électricité est de 99% en Afrique du Nord et de 32% en Afrique subsaharienne.
- Entre le milieu urbain et le milieu rural : De larges pans du monde rural en Afrique demeurent sans accès à l’électricité.
L’Afrique dont les ressources énergétiques sont fortement convoitées par les puissances étrangères représente 9,5% de la production mondiale¹¹ de pétrole pour une part dans la consommation mondiale de l’ordre de 4%. Les ressources gazières (8,4% de la production mondiale¹² sont peu exploitées localement, surtout en Afrique subsaharienne, faute d’infrastructures appropriées et sous l’effet de la lenteur de mise en œuvre de politiques de diversification du mix-énergétique.
Les réserves de charbon sont fortement concentrées en Afrique du Sud (94% de la production du continent¹³) dont l’exploitation soulève d’importants défis environnementaux.
La biomasse est utilisée massivement en tant que source d’énergie pour les usages domestiques en Afrique subsaharienne avec, toutefois, des conséquences négatives sur le plan environnemental : déforestation, pollution…
Le potentiel important d’énergies renouvelables, notamment en matière d’énergie solaire et éolienne n’est que faiblement exploité. La mobilisation de ce potentiel permettrait à la fois de sécuriser les besoins énergétiques du continent, à des fins de développement et de répondre aux impératifs de préservation de l’environnement.
Des perspectives de long terme laissent entrevoir un accroissement de la demande en énergie dans un contexte d’accentuation des effets du changement climatique :
- Un rythme de croissance économique soutenu en Afrique, de l’ordre de 5% au minimum, à l’instar de la moyenne des dix dernières années14qui s’accompagnerait d’une amélioration progressive du revenu par habitant.
- Une poussée démographique : A l’horizon 2050, la population africaine devrait doubler pour s’établir à 2,4 milliards d’habitants15.
- Une progression de l’urbanisation en Afrique (56% en 2050 contre 40,4% en 201516) qui occasionnerait des besoins davantage importants en électricité et en énergie pour les besoins du transport.
L’électrification du continent devient un impératif, eu égard aux exigences en termes de développement humain. Selon l’Agence Internationale de l’Energie, le taux d’accès à l’électricité en Afrique, qui est actuellement de 43% passerait à l’horizon 2040 à 73%, selon le « New policy scenario » et à 85% selon le scénario « African centry case » :
- Le premier scénario prend en considération les engagements des pays, en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre ainsi que l’élimination progressive des sources d’énergies
- Le second scénario tient en compte en plus d’un renforcement de la gouvernance des ressources énergétiques en Afrique et d’une coopération régionale
La réalisation du projet de gazoduc Nigéria-Maroc permettrait d’accélérer l’électrification de la région d’Afrique de l’Ouest, en créant un marché régional compétitif de l’électricité, de développer des pôles industriels intégrés et d’attirer des capitaux étrangers qui participeraient à la transformation économique du continent.
- 11. Base de données statistiques de l’Agence Internationale de l’Energie, 2015
- 12. Agence Internationale de l’Energie, 2013
- 13. Agence Internationale de l’Energie, 2015
- 14. FMI, 2014
- 15. UN Population, 2014
- 16. UN World Urbanization Prospects, the 2014 revision
- Ces données constituent un extrait du rapport intitulé: « Energies-climat, deux questions stratégiques interdépendantes », publié par l’Institut royal des études stratégiques (IRES) du Maroc le 03 novembre 2017.