Les enseignements de la gouvernance du secteur extractif pour les projets d’énergies renouvelables




Par Dr Gokce Mete and Joanne Jones

 

De plus en plus de voix s’élèvent pour demander une accélération de la transition vers une économie à zéro carbone. Quel que soit son rythme, cette transition impliquera vraisemblablement de profondes transformations, des compromis et des incertitudes, comme l’indique le site Extractives Hub dans un récent blogue sur le thème de la transition énergétique et le secteur extractif. Toutefois, cette transition vers une économie à plus faibles émissions de carbone pourrait en réalité offrir une position avantageuse aux pays exportateurs de matières premières. En effet, leur expérience peut leur apporter d’importants enseignements en matière de bonne gouvernance, particulièrement en ce qui concerne les moyens d’éviter une « malédiction des ressources renouvelables ». En tirant parti de ces enseignements, les pays riches en ressources naturelles disposent d’une occasion unique d’influencer les politiques mondiales et de contribuer à une transition à la fois plus rapide et plus équitable.

Enseignement 1 : La corruption n’affecte pas uniquement le secteur extractif. Les risques de corruption et de recherche de rentes s’appliquent aux projets d’énergie renouvelable autant qu’au secteur extractif. À l’instar du développement de projets extractifs, les projets dans le domaine des énergies renouvelables exigent des capitaux considérables. Même si le coût des technologies axées sur les énergies renouvelables ne cesse de baisser, les risques politiques élevés qui les entourent, particulièrement en Afrique subsaharienne, compliquent souvent les initiatives de levée de capitaux. De nombreux projets d’énergie renouvelable bénéficient d’un soutien de l’État et peuvent prévoir la délivrance de certificats d’énergie renouvelable. On observe déjà des exemples de liens entre ces subventions et la corruption. Des études ont montré que les responsables politiques doivent porter une plus grande attention au risque que des politiques publiques soient faussées sous l’effet de perspectives de gains considérables dans des régions où la faiblesse des institutions, et les complexités de la bureaucratie sont susceptibles d’encourager des comportements illicites.

Enseignement 2 : Ne pas hésiter à mener des consultations. Peu à peu, le secteur extractif a fini par reconnaître toute l’importance de la conduite de consultations avec les parties prenantes et de la promotion du développement communautaire. Une telle coopération est tout aussi essentielle dans le secteur des énergies renouvelables, car elle permettra d’instaurer la confiance dans ces nouvelles technologies. Si ces projets ne parviennent pas à recueillir le soutien et le degré de compréhension nécessaires, il pourrait être plus difficile d’obtenir l’acceptation du public.

Enseignement 3 : Intégrer les projets et tirer parti d’apports locaux pour les rendre durables. Au même titre que les projets extractifs, les projets d’énergie renouvelable suscitent souvent de grandes attentes – par exemple, en matière d’électrification d’habitations, d’hôpitaux et d’établissements scolaires. Ainsi, pour assurer l’adoption de technologies à énergies renouvelables, il faut que l’on apprécie pleinement les liens interdépendants entre, d’une part, les parties prenantes et, d’autre part, les perspectives de maintien et de durabilité des projets. Cela exige une planification sérieuse et l’instauration de partenariats transparents. En effet, trop nombreux sont les exemples de projets d’énergie renouvelable qui, une fois établis, ont été laissés à l’abandon. Les exigences en matière de contenu local s’appliquent également aux projets d’énergie renouvelable et représentent un important outil permettant de concentrer les dépenses et les activités de fabrication au niveau local, créant ainsi des emplois et établissant des noyaux économiques. Toutefois, s’ils font l’objet de tentatives de manipulation, les objectifs des politiques de contenu local risquent de ne pas aboutir et peuvent être détournés pour enrichir des individus ou des sociétés, ou à des fins de corruption.

Enseignement 4 : Le respect des exigences de transparence peut limiter la corruption dans les processus de passation de marchés. À l’instar des octrois de licences minières, pétrolières et gazières, l’attribution de projets d’énergie renouvelable nécessite des procédures légales bien claires pour garantir l’objectivité et la transparence du processus, pour décourager le népotisme et le favoritisme, et pour promouvoir la sélection de partenaires de mise en œuvre compétents et qualifiés. Dans les projets d’infrastructures de grande envergure, l’octroi de subventions peut déboucher sur l’exercice de pressions politiques dans le cadre du processus d’octroi de licences. Les divulgations sur la propriété effective, qui s’inscrivent de plus en plus dans les exigences en matière d’octrois de licences pour les projets extractifs, pourraient également être appliquées au secteur des énergies renouvelables afin de limiter l’influence de personnes politiquement exposées. Dans certains pays, des organes de réglementation et des fonds d’investissements indépendants ont été établis. L’adhésion à des initiatives mondiales de transparence telles que le Partenariat pour un gouvernement transparent et l’Open Contracting Partnership pourrait s’avérer avantageuse pour les gouvernements. Les mesures de ce type jouent un rôle important pour libérer le potentiel de l’Afrique subsaharienne dans le domaine des énergies renouvelables, car cela nécessitera des investissements considérables de l’étranger.

Les risques de corruption continuent de représenter un obstacle majeur à une transition énergétique mondiale équitable, où personne ne sera laissé pour compte, mais elle sera réalisable si l’on met à profit les enseignements que le secteur extractif a tirés au fil des ans.

 


  • Article initialement publié sur Extractives Hub et Eiti.org
  • Gokce Mete est chargée de contenu sur Extractives Hub, une plateforme de connaissances digitale épaulant les gouvernements dans la gestion de leur secteur extractif.
  • Joanne Jones est chargée de l’équipe de l’Extractives Hub et elle est riche d’une vingtaine d’années d’expérience dans le secteur exctractif.

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