Les défis du capital investissement en Afrique, vus par Proparco




Par Jérémie Ceyrac, responsable Investissements Afrique et Méditerranée de Proparco, filiale de l’Agence française de développement dédiée au secteur privé

 

Avec 1,6 milliards de dollars de levées de fonds en 2017, un montant en baisse pour la seconde année consécutive, le capital investissement en Afrique subsaharienne n’a pas retrouvé sa vigueur des années 2014-2015. Le volume de transactions est lui aussi resté stable autour de 2 milliards de dollars et le taux de pénétration du capital investissement peine à décoller sur le continent, à 0,1% du PIB (contre 0,3% en Inde et 1,9% au Royaume-Uni).

La volatilité du cours des devises, l’instabilité politique et réglementaire ainsi que le manque de diversification des économies sont toujours les principaux freins cités par les investisseurs internationaux pour expliquer leurs réticences à allouer du capital sur le continent. Le développement du private equity reste par ailleurs marqué par une très forte disparité, 5 pays continuant de concentrer près des deux-tiers des volumes de transactions recensés par l’AVCA[1] entre 2012 et 2017.

Ce discours pessimiste est néanmoins à relativiser au regard d’un certain nombre de développements récents.

En 2016, 48 cessions ont pu être réalisées par les fonds de capital investissement du continent, dont 17 rachats secondaires (ventes à d’autres fonds). Un record tendant à démontrer la maturité croissante du marché africain. Les levées de fonds devraient également repartir à la hausse en 2018-2019 avec le retour attendu sur le marché de certains gros gestionnaires pour la levée de leur prochain véhicule.

De nouvelles typologies de fonds d’investissement font également leur apparition sur le marché. Les structures sans durée de vie limitée ou les fonds mezzanine sont deux exemples intéressants qui permettent de composer avec certaines particularités du marché africain. En effet, les événements socio-économiques qui affectent de façon récurrente le continent ainsi que les délais plus longs pour créer de la valeur posent légitiment la question de la pertinence pour le continent du modèle traditionnel des véhicules avec une durée de vie limitée à 10 ans. De son côté, la mezzanine, en tant qu’instrument non dilutif pour les actionnaires de l’entreprise, permet de répondre aux contraintes des groupes familiaux, gérant leur société dans une optique patrimoniale. Proparco travaille actuellement avec deux gestionnaires spécialisés sur le segment qui devraient lever leur fonds mezzanine en Afrique en 2018.

Dans ce contexte, les institutions de développement telles que Proparco, jouent pleinement leur rôle catalyseur. En apportant un capital patient, elles agissent de manière contra-cyclique et soutiennent l’intégralité des segments du capital investissement pour permettre à la fois de pérenniser les équipes de gestion et de soutenir des stratégies jugées plus risquées ou dynamiser l’investissement en faveur des PME et des start-ups. A titre d’exemple, Proparco a ainsi récemment soutenu le fonds Agri Vie II du gestionnaire Exeo en 2017, Oasis Africa Fund ou IPAE II tous deux dédiés au segment des TPME en Afrique de l’Ouest, ou encore Tide Africa du gestionnaire spécialiste du venture capital TLcom.

En permettant la diffusion de meilleures pratiques, l’amélioration des standards de gouvernance, l’attraction et la formation de talents au sein des entreprises financées, le capital-investissement est un vecteur efficace de développement. C’est pourquoi, Proparco en a fait un axe majeur de sa nouvelle stratégie et prévoit d’y consacrer 25 % de son activité à l’horizon 2020, soit 500 millions d’euros par an.

 


  • [1] African Private Equity and Venture Capital Association
  • Texte initialement publié sur le site web de Proparco

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