Le Cameroun commence à se plaindre de la pression des cours des produits pétroliers sur ses finances publiques




Avec sa structure des prix fixes, qui permet d’engranger des économies en cas de faibles cours et de subventionner lorsque les prix grimpent, le gouvernement camerounais craint qu’avec la persistance de la tendance sur les marchés à fin mars les subventions n’atteignent 672 milliards de F CFA sur un an. Le pays d’Afrique centrale est producteur de pétrole et de gaz mais importe la totalité de ses besoins en carburants et plus de 80% de ses besoins en gaz domestique

 

Alors qu’en 2020, l’Etat camerounais avait engrangé des plus-values (et donc des ressources financières) sur les prix administrés des carburants – qui étaient vendus dans les stations-service à un prix plus élevé que le prix réel -, la situation en 2022, depuis le déclenchement en février de l’opération militaire de la Russie en Ukraine et les sanctions occidentales qui ont suivi contre Moscou, inquiète le gouvernement.

Le ministre du Commerce, Luc Magloire Mbarga Atangana, qui est par ailleurs le président de la Caisse de stabilisation des prix des hydrocarbures (CSPH), a tenu un point de presse le 30 mars à Yaoundé pour présenter le niveau envisagé sur les subventions avec la tendance actuelle des cours du pétrole et des produits finis. 

Alors qu’en 2020, la moyenne des prix réels était de 586,84 F CFA le litre d’essence super, 553,68 F CFA le litre de gasoil, 446,76 F CFA le litre de pétrole lampant, 8 024 F CFA la bonbonne de gaz de pétrole liquéfié (communément appelé gaz domestique) de 12,5 kg, les prix “actualisés” et présentés le 30 mars par le Mincommerce sont de 1 016 FCFA le litre d’essence super, 1 027 FCFA le litre de gasoil, 13 277 FCFA la bonbonne de gaz domestique de 12,5 kg et 849 F CFA le litre de pétrole lampant. 

Les prix administrés, auxquels les consommateurs s’acquittent de l’achat de ces différents produits, est de 630 F CFA le litre de super à la pompe, 575 FCFA le litre de gasoil, 6500 FCFA la bonbonne de gaz domestique de 12,5 kg et 350 FCFA pour le litre de pétrole lampant.

Luc Magloire Mbarga Atangana a indiqué qu’en projetant la situation actuelle sur un an, l’Etat engagerait des subventions de l’ordre de 672 milliards de F CFA (1 milliard d’euros) pour prendre en charge la différence entre le prix administré et le prix réel sur le super, le gasoil et le pétrole lampant. Pour comparaison, en 2020, le manque à gagner pour ces trois produits s’était situé à 2,28 milliards de F CFA (environ 3,48 millions d’euros), selon les données officielles.

Pays producteur 

Les prix des produits pétroliers sont fixés en tenant compte de la conjoncture internationale et de certains facteurs locaux (taxes, éloignement des stations-service par rapport aux dépôts, entre autres). Au niveau international, il s’agit principalement du cours du baril de pétrole brut (auquel les prix du diesel et de l’essence sont souvent largement corrélés) en y ajoutant les coûts du fret, le taux de change entre les monnaies (dollar et franc CFA dans notre contexte). Le Cameroun, pour éviter les revendications sociales qui pourraient découler d’une régulière fluctuation des prix, a choisi depuis des décennies d’avoir des prix homologués pour le super, le gasoil, le pétrole lampant et le GPL (butane à usage de gaz domestique). Seuls deux carburants n’ont pas de prix homologués au Cameroun: le fioul (utilisé dans les centrales thermiques) et le Jet A1 (pour les avions). 

En juin 2020, le ministre camerounais de l’Energie, Gaston Eloundou Essomba, avait expliqué que le Cameroun réalisait des plus-values dans son système de fixation des prix lorsque le cours du baril de Brent se situait autour de 40 dollars américains, l’Etat subventionnant au-delà pour maintenir les prix homologués. 

Vers 15h45 GMT ce 31 mars, le baril de Brent de la mer du Nord pour livraison en mai, dont c’est le dernier jour d’utilisation comme contrat de référence ce jeudi, se situait à 108,31 dollars. Le baril de West Texas Intermediate (WTI) américain pour livraison le même mois se situait quant à lui à 103,92 dollars. Le baril de Brent avait dépassé 139 dollars le 7 mars, un niveau qui n’avait plus été atteint depuis 2008. 

D’où viendront les ressources du Cameroun pour maintenir la subvention? Même s’il importe tous ses produits pétroliers et 80% de ses besoins de gaz domestique, le pays d’Afrique centrale est producteur de pétrole et de gaz et bénéficie donc ainsi de la hausse des cours de ces matières premières énergétiques au niveau de la Société nationale des hydrocarbures (SNH) qui gère ce secteur pour l’Etat. Les revenus de la vente des hydrocarbures peuvent compenser partiellement ou totalement les pertes au niveau de l’importation et de la vente des produits pétroliers. La comparaison chiffrée n’est pas souvent présentée par le gouvernement.

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