Comment les agences de crédit à l’exportation “sapent” l’Accord de Paris (rapport)




D’après une étude du centre de recherche Oil Change International, 88% des financements des ACE des pays membres du G20, dans le domaine de l’énergie, sont encore destinés à des projets de combustibles fossiles

 

Les agences de crédit à l’exportation (ACE) – ou export credit agencies (ECA) en anglais – des 20 pays membres du G20, à travers les financements qu’elles accordent dans les projets pétroliers et gaziers, “sapent  l’Accord de Paris sur le climat”, dénonce l’organisation Oil Change International dans un rapport publié le 16 octobre dernier.

En décembre 2015 en France, lors de la COP 21, 195 délégations avaient approuvé l’Accord de Paris sur le climat, énonçant des mesures pour limiter la hausse de la température à 2° C d’ici 2100. Parmi ces mesures, le désinvestissement dans les énergies fossiles en rendant les flux financiers compatibles avec les perspectives de réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Le carbone produit par le secteur de l’énergie représente deux tiers des émissions mondiales de gaz à effet de serre.

Selon Oil Change International, qui publie régulièrement des enquêtes aux fins de sensibilisation et de plaidoyer sur “le coût réel” des combustibles fossiles: entre 2013 et 2015, les ACE ont fourni plus de 32 milliards de dollars dans le financement de projets pétroliers et gaziers.

Près de 23% de ces financements sont allés dans l’exploration de nouveaux puits de pétrole et de gaz.

La plupart des ECA ont réduit leurs financements sur les projets de centrale à charbon mais soutiennent les projets pétroliers et gaziers.

Il n’y a quasiment pas de restrictions internationales sur le financement des projets pétroliers et gaziers, dénonce l’étude. Deux exceptions notables sont toutefois à relever selon Oil Change International: la Banque africaine de développement (BAD) et la Banque asiatique de développement (ADB), qui ne financent pas l’exploration de nouveaux champs pétroliers et gaziers.

De façon globale, indique le Centre, 88% des financements des ACE dans le domaine des énergies sont destinés à des projets de combustibles fossiles.

Parmi les trois pays qui font partie des plus grands pourvoyeurs de fonds à ces combustibles, figurent, par ordre: le Japon, avec environ 13 milliards de dollars accordés aux énergies fossiles; la Corée (08 milliards) et les Etats-Unis (environ 06 milliards).

L’étude, “approuvée par 09 associations” partenaires de Oil Change International, a été publiée sous le titre: Financing climate disaster. How Export Credit Agencies Are a Boon for Oil and Gas (Financer la catastrophe climatique. Comment les agences de crédit à l’exportation sont une aubaine pour les industries du pétrole et du gaz).

Intérêt d’observer les agences de crédit à l’exportation

De nombreux pays du G20 proclament publiquement la nécessité de passer à l’action mais très peu prennent les initiatives attendues, regrette Oil Change International.

D’après l’organisation, les agences de crédit à l’exportation sont sont un terrain d’observation intéressant en matière de soutien public et national aux énergies fossiles.

Agences de crédit à l’exportation prises en compte dans l’étude © Oil Change International

Les ACE fournissent des garanties soutenues par le gouvernement, assurances et crédits pour soutenir l’exportation de biens et services à l’étranger. “Ce soutien public donne de la facilité aux entreprises à faire des affaires dans d’autres pays, particulièrement dans des marchés à risque […] la plupart des pays à revenu élevé et actuellement de nombreux pays à revenu intermédiaire ont au moins une agence de crédit à l’exportation qui est généralement une agence gouvernementale officielle ou quasi-officielle. et qui agit dans tous les cas au nom du gouvernement”, explique le centre de recherche.

Cependant, avertit Oil Change International, les données présentées sont “sous estimées” parce que très peu de pays donnent un accès détaillé sur sur les investissements dans les domaines pétroliers et gaziers.

Oil Change International a exploité des données publiques des ACE de quelques pays membres du G20: Australie, Canada, Chine, France, Allemagne, Inde, Italie, Japon, Corée du Sud, Mexique, Russie, Afrique du Sud, Royaume-Uni, Etats-Unis.

L’organisation invite les ACE de l’Organisation pour la coopération et le développement économiques (OCDE) à s’engager à stopper tout financement aux énergies fossiles d’ici 2020 au plus tard. Les pays non-membres de l’OCDE doivent également envisager un développement en dehors des énergies fossiles tenant compte de leurs “responsabilités communes mais différenciées”.

La position de Oil Change International: si tous les gisements actuels sont exploités, la trajectoire d’un réchauffement climatique de 2°C à l’horizon 2100 sera largement dépassée. D’où l’intérêt, selon elle, de ne pas repousser la sortie de ces énergies fossiles au risque de voir cette sortie s’imposer d’elle même, brutalement.

Financing-Climate-Disaster report
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